2025, année de prévention de l'effondrement... et 2026, année des décisions économiques qui ne peuvent être retardées
À la fin de l'année 2025, la question économique la plus sincère n'est pas : que avons-nous réalisé ? mais : comment avons-nous évité l'effondrement ? L'économie palestinienne n'a pas connu cette année un chemin de croissance naturelle mesurable par des indicateurs d'investissement ou d'emploi, mais a évolué dans une marge étroite entre la continuité et le recul. Ce fut une année difficile pour les familles, épuisante pour les institutions, et révélatrice des limites du modèle économique existant, ainsi que du coût du report des réformes profondes reportées d'année en année.
Économiquement, on peut dire que la plus grande réalisation de 2025 a été la prévention de l'effondrement. C'est une description réaliste qui ne souffre pas d'exagération. La solidité du système bancaire malgré la crise de liquidité et de monnaie, et le maintien du paiement des salaires – même partiels – ont préservé le minimum de la cycle économique et évité son arrêt complet. Les salaires représentent encore plus d'un tiers des dépenses publiques, et des dizaines de milliers de familles en dépendent comme source principale de revenus, ce qui rend toute perturbation dans ce domaine une menace directe pour la stabilité sociale, et pas seulement une question financière ou comptable.
Dans le même temps, le secteur privé a continué à opérer dans des conditions extrêmement difficiles. La faiblesse de la demande, la montée des coûts et la diminution de la certitude économique ont lourdement pesé sur les petites et moyennes entreprises, mais ce secteur a maintenu un minimum d'activité, contribuant à garder les marchés vivants, même lentement. Le débat sur la digitalisation, le paiement électronique, et la gestion de la trésorerie a été amené du cadre technique étroit vers le domaine public, reflétant une prise de conscience croissante de la nature de la crise structurelle vécue par l'économie palestinienne, et de la nécessité de solutions dépassant les mesures temporaires.
Cependant, la lecture du paysage n'est pas complète sans évoquer l'une des transformations les plus graves de 2025, à savoir le recul de l'emploi des Palestiniens à l'intérieur de la ligne verte. Pendant de nombreuses années, cet emploi a constitué un levier essentiel des revenus et de la liquidité, et une colonne vertébrale non déclarée de la stabilité économique. Des dizaines de milliers de familles ont dépendent de manière directe ou indirecte de ce revenu, qui dynamisait la consommation, soutenait les marchés locaux, et allégerait la pression sur les finances publiques.
Cependant, les restrictions croissantes, la réduction des permis de travail, et l'augmentation de l'incertitude ont conduit à l'émergence d'un grand nombre de travailleurs de ce marché, voire à la diminution de leurs jours de travail et de leurs revenus. Ce n'était pas simplement une crise de l'emploi, mais un choc salarial large qui a immédiatement eu des répercussions sur l'économie locale, allant de la baisse de la consommation à une liquidité affaiblie, jusqu'à une pression accrue sur les familles, les banques et les finances publiques.
En fonction des estimations publiées par des organisations syndicales et des rapports internationaux, les pertes cumulées des revenus des travailleurs palestiniens et de l'économie locale résultant de l'interdiction d'accès au marché du travail israélien se chiffrent entre 8 et 10 milliards de dollars, soit l'équivalent d'environ 28 à 35 milliards de shekels selon les taux de change en vigueur. Ces chiffres ne traduisent pas seulement des salaires manquants, mais aussi une liquidité absente des marchés, un pouvoir d'achat érodé, et des impacts multiplicateurs touchant l'économie dans son ensemble.
Le plus grave est que cette perte n'était ni temporaire ni marginale, mais représentait une érosion continue de l'une des principales sources de revenus extérieurs de l'économie palestinienne, révélant à nouveau la fragilité d'un modèle basé sur un marché du travail externe instable, entièrement soumis à des décisions politiques et sécuritaires échappant au contrôle palestinien.
Malgré cette résistance fragile, 2025 a également été l'année du renforcement de la politique de gestion de crise plutôt que de son traitement. Nous n'avons pas observé de réforme radicale des finances publiques, ni de restructuration claire du système salarial, ni de transition réelle vers une économie productive réduisant la dépendance excessive à l'égard des compensations et des prêts bancaires. Les solutions sont demeurées temporaires, et le coût a continué de s'accumuler, alors que le système bancaire était chargé de rôles dépassant sa fonction naturelle, et le citoyen se retrouvait face à des revenus érodés et à des coûts de la vie en hausse.
De là, l'année 2026 ne vient pas comme une extension confortable, mais comme un véritable moment de décision. Une année qui ne tolérera pas des discours rassurants non soutenus par des faits, ni des solutions grises qui retardent l'explosion au lieu de l'aborder. Il est d'abord nécessaire de redéfinir le rôle du gouvernement dans l'économie, et de passer progressivement d'un rôle de plus grand employeur et consommateur à un rôle de régulateur intelligent, qui crée un environnement productif, stimule l'investissement, et accorde au secteur privé un véritable espace de croissance.
De plus, l'année 2026 nécessite de traiter le choc des travailleurs intérieurs dans le cadre d'une vision globale, et non par des solutions partielles ou temporaires. Des politiques actives sont requises pour créer des alternatives locales, et pour intégrer les travailleurs dans des secteurs productifs capables de générer des revenus réels, au lieu de laisser des dizaines de milliers dans un cercle de chômage ou d'emplois précaires à bas salaire.
Quant à la digitalisation, c'est une nécessité, pas une option, mais à condition qu'elle soit un outil de réforme et non un instrument de pression. La transition vers le paiement électronique et la gestion de la trésorerie doit se faire progressivement, en protégeant les groupes vulnérables, et en construisant la confiance avec le citoyen, sans lui imposer des réalités. Le succès dans cette voie ne se mesure pas seulement en technologie, mais aussi en sa capacité à renforcer la justice et l'efficacité en même temps.
Enfin, la responsabilité ne peut être réduite à une seule partie. Le gouvernement, l'autorité monétaire, les banques, le secteur privé, et le citoyen, tous sont partie prenante de l'équation. Ce qui est nécessaire en 2026, c'est un débat économique franc, qui mettra les faits sur la table sans exagération ni simplification, et qui reconnaît les contraintes sans capitulation.
2025 nous a appris que la résistance est possible, mais qu'elle est coûteuse et douloureuse. Quant à 2026, elle déterminera si nous sommes capables de passer de la gestion de la crise à sa réforme. Ce dont nous avons besoin, ce n'est pas d'une économie de plus grande taille, mais d'une économie plus honnête envers elle-même, plus juste envers ses citoyens, et plus courageuse dans ses décisions.
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