Les voix de la marge prennent de l'ampleur
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Les voix de la marge prennent de l'ampleur

Israël a connu, au cours de deux années de guerre sur la bande de Gaza, des efforts remarquables, que l'on peut qualifier d'audacieux, concernant l'affinement des raisons qui ont conduit la situation à ce qu'elle est aujourd'hui, tout en proposant une option sur laquelle on peut compter pour sortir de l'état actuel. Ce sont des efforts qui comportent plusieurs implications difficiles à aborder ici de manière suffisamment détaillée et explicite.

À mon avis, en ce qui concerne spécifiquement les politiques d'Israël, la réserve de certains face à ces politiques, ancrée dans le doute sur le sionisme en tant qu'idée et pratique depuis sa création, est la plus frappante.

Ces voix restent marginales, mais elles prennent de l'ampleur. La majorité considère encore que toute critique substantielle du sionisme constitue une atteinte à "l'essence de l'État". Cependant, la répétition des massacres à Gaza, la détérioration de l'image d'Israël sur la scène internationale à un niveau sans précédent, en plus de la division interne, ont conduit des écrivains et des journalistes israéliens à réévaluer la question : le sionisme était-il valablement un "fondement moral" pour un État ? C'est une question qui découle essentiellement de la vision selon laquelle la destruction totale à Gaza, la transformation des Palestiniens en réfugiés, et leur famine, constituent des formes de génocide. Certains ont établi un lien entre ce qui se passe à Gaza depuis deux ans et la Nakba de 1948, en faisant allusion à la continuité des politiques sionistes qui ont causé la Nakba.

Au sein de ces voix, certains tentent de revendiquer que ce qui se passe est une souillure du "rêve sioniste", et il y a derrière cette revendication un appel à revenir à l'engagement envers ce rêve. Cependant, à l'intérieur même de ce discours, il y a des voix qui estiment que ceux qui adoptent cet appel vivent une auto-tromperie profonde, le sionisme a atteint l'état actuel en raison de ses origines, et il n'y a pas d'alternative en son sein, et il n'y en aura pas.

C'est, comme l'a récemment affirmé l'historien Avi Shlaim et l'écrivain Koubi Niv, un système oppressif et violent, et toute personne qui se décrit comme sioniste proclame son appartenance à cette réalité. L'auteur de ces lignes a déjà noté que Niv a décrit ce qui se passe à Gaza comme une poursuite de la Nakba, considérant qu'Israël emprunte la voie de la perte de son humanité, et que le sionisme, qui a promis le salut aux Juifs, s'est transformé en un outil de justification pour le meurtre et l'hégémonie.

Cela a entraîné la formulation d'une question qui était presque taboue : "Pouvons-nous nous libérer du sionisme ?", en remettant en question l'idée fondatrice elle-même : le sionisme comme doctrine, et non seulement comme mouvement politique. Bien qu'il soit encore limité, cela reflète une crise dans la structure de l'identité israélienne.

Il convient de souligner deux conclusions auxquelles la plupart des personnes ayant posé cette question sont parvenues : premièrement, que la doctrine sioniste est devenue, dans son essence et en raison de ses origines, un prétexte permanent à la violence envers les Palestiniens. Cela devrait signifier pour le consensus juif la perte de son sens libérateur qui a été promu depuis sa création, sans parler de son évolution en un fardeau pour ses porteurs.

Deuxièmement, l'appel à se libérer du sionisme n'est pas nécessairement un appel à détruire Israël comme le prétendent ses adversaires, mais plutôt à se libérer de l'implication dans un projet colonial à long terme. Dans ce contexte, des écrivains et des historiens israéliens parlent de la nécessité de ce qu'ils appellent une "nouvelle Israël" qui ne repose pas sur l'hostilité envers le Palestinien, ni sur le déni de son histoire, mais sur un partenariat humain et politique après reconnaissance de l'injustice historique continue depuis 1948.

Peut-être que les partisans de cet appel ne constituent pas aujourd'hui un courant politique organisé, mais leur approche représente une étincelle intellectuelle qui pourrait évoluer avec le temps, surtout si la conscience éthique de plus en plus de catégories israéliennes s'accroît. Il se pourrait que les faits accumulés au cours de deux années de guerre à Gaza aient prouvé que la force militaire ne garantit pas la sécurité comme elle n'a pas garanti le salut, et que le chemin vers leur fourniture commence par la libération de soi de la doctrine qui a justifié et continue de justifier la violence contre les Palestiniens.

Cet article exprime l'opinion de son auteur et ne reflète pas nécessairement l'opinion de l'Agence de Presse Sada.