Une reconnaissance qui ne s’arrête pas aux frontières de la Somalie...
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Une reconnaissance qui ne s’arrête pas aux frontières de la Somalie...

L'annonce du gouvernement de Benjamin Netanyahu reconnaissant le Somaliland s'inscrit dans une démarche israélienne désormais connue, qui consiste à investir dans les conflits internes des pays et à saisir de telles opportunités pour renforcer une doctrine de sécurité israélienne, à savoir l'affaiblissement et la fragmentation des États de la région, les maintenant en proie à leurs problèmes, en les renforçant là où ils existent, et en essayant de les créer s'ils n'existent pas. Cela signifie ne pas respecter le principe de l'unité des États et de leur souveraineté.

La région du Somaliland est située au nord de la Somalie, avec une superficie d'environ 176 000 kilomètres carrés, habitée par entre quatre et quatre millions et demi de personnes. Elle donne au nord sur le golfe d'Aden, ce qui en fait l'une des routes maritimes internationales les plus dangereuses et importantes menant à la mer Rouge et au Bab el-Mandeb.

La faiblesse de l'État central somalien au début des années 1990 a poussé des dirigeants locaux des clans à déclarer unilatéralement l'indépendance en mai 1991, dans une région qui avait été sous mandat britannique jusqu'en 1961.
Depuis 1991, la région est gérée comme un État de facto, avec un gouvernement, un parlement, une monnaie et des services de sécurité, mais elle est restée en dehors de la reconnaissance internationale, n'étant pas reconnue par l'ONU ni l'Union africaine, et n'ayant jusqu'à aujourd'hui obtenu aucune reconnaissance légale complète de la part des États du monde, ni de quelque État que ce soit.

La reconnaissance israélienne signifie briser une règle bien établie dans le système arabe, africain et international, qui consistait à préserver l'unité des États héritée de l'époque postcoloniale.

En d'autres termes, Israël tente d'instaurer un précédent selon lequel le "fait accompli" peut se transformer en légitimité internationale dès qu'il bénéficie d'un parrainage politique et d'un soutien extérieur approprié. Du Somaliland à d'autres, cela signifie que Netanyahu rêve de changer et de saper les règles internationales convenues, de sorte que la prétendue légitimité internationale disparaisse. Et ce faisant, il éloigne les regards de Gaza, de la colonisation en Cisjordanie et de la Cour pénale internationale.

Il s'agit d'une politique israélienne ancienne qui repose sur le soutien aux tendances séparatistes dans les pays de la région pour affaiblir les États centraux qui pourraient constituer une concurrence ou une adversité envers Israël, et soutient ce qui occupe ces États sur le plan interne, rendant l'intervention étrangère, que maîtrise Israël, une porte pour la pression et l'extorsion. C'est ce qu'elle fait dans le sud de la Syrie, pour affaiblir le pouvoir central syrien et le maintenir dans un état de conflit et d'échec après les destructions causées par la guerre. On sait qu'Israël a déjà joué un rôle en Irak, pour affaiblir l'État central irakien, et au Liban en soutenant des forces séparatistes, tout en s'efforçant en Palestine d'isoler la Cisjordanie de la bande de Gaza.

À l'intérieur, elle traite les Arabes comme des sectes religieuses, refuse de les reconnaître comme une minorité nationale arabe palestinienne, et encourage toute tendance qui contribue à fragmenter cette minorité.

La région du Somaliland, donnant sur le golfe d'Aden, est en contact direct avec les voies maritimes et énergétiques mondiales, proche de la mer Rouge et du Bab el-Mandeb. Toute présence israélienne dans cet espace, même si elle commence sous la forme d'une coopération diplomatique ou sécuritaire, ouvre la porte à un positionnement stratégique à long terme, exerçant une pression sur la sécurité nationale arabe, en particulier l'Égypte, et la soumet à de nouvelles équations qui touchent à la sécurité de la navigation internationale et au canal de Suez.

Dans ce contexte, il ne faut pas écarter la possibilité que cette reconnaissance passe d'une étape politique à une porte de coopération sécuritaire et militaire, et il se peut que l'entraînement et la coopération militaires soient déjà en cours.

La reconnaissance diplomatique ne se limite pas à la coopération dans les domaines de la formation ou de l'armement léger, et ici il ne faut pas négliger le rôle des Émirats Arabes Unis en raison de leur présence économique et logistique au Somaliland sur la mer Rouge, et de leurs liens étroits avec Israël.

Ce parcours offre à Israël un point d'ancrage indirect près du Bab el-Mandeb, sans avoir besoin de bases militaires déclarées, ce qui explique l'inquiétude égyptienne et arabe face à la transformation de la reconnaissance du Somaliland en une partie de la redéfinition des cartes d'influence dans la mer Rouge, sous des titres de coopération et de sécurité maritime, et non sous l'égide d'une expansion militaire explicite.

De ce point de vue, la réponse angoissée de l'Égypte est arrivée, car l'Égypte considère la mer Rouge comme une extension directe de sa sécurité nationale, et non simplement comme une voie de transit maritime. L'Égypte, malgré sa complicité dans la guerre de Gaza pendant deux ans de massacre, réalise que l'ouverture d'une porte au changement des règles du jeu dans la corne de l'Afrique aujourd'hui la met, elle et le monde arabe, devant des réalités plus complexes demain, non seulement au Bab el-Mandeb, mais dans toutes les arènes de décomposition potentielles, du Soudan à la Syrie, de la Libye à la Palestine.

La reconnaissance de Netanyahu du Somaliland est le maillon d'un processus plus large cherchant à redéfinir ce qu'est un État dans la région, transformant la décomposition d'une situation exceptionnelle en un principe politique légitime. Netanyahu agit comme un leader régional sans rival, et voit désormais toute la région comme un terrain d'application de ses projets, les reliant tous à la réalisation du rêve d'un grand État juif, punissant quiconque ose se relever.

Cet article exprime l'opinion de son auteur et ne reflète pas nécessairement l'opinion de l'Agence de Presse Sada.