7 milliards de shekels en jeu : Salaires des employés entre le marteau des compensations et l'enclume des obligations
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7 milliards de shekels en jeu : Salaires des employés entre le marteau des compensations et l'enclume des obligations

La crise des salaires des employés publics en Palestine n'est plus seulement un chiffre dans le budget général, mais est devenue une boule de feu qui menace la stabilité économique et sociale dans son ensemble. Avec des créances s'élevant à 7 milliards de shekels, un chiffre sans précédent dans l'histoire de l'Autorité palestinienne, l'économie se trouve aujourd'hui confrontée à un ultime test de confiance, dans un contexte de solutions repoussées et d'une crise de plus en plus complexe chaque jour.

Ces créances, qui représentent une dette silencieuse pour le gouvernement, ne sont pas de simples engagements financiers reportés, mais un reflet direct d'une crise structurelle profonde. Depuis plus de quatre ans, environ 146 000 employés publics n'ont reçu leur salaire complet qu'une seule fois, les poussant pour la plupart au bord du gouffre, les accablant de dettes et plongeant les marchés dans une profonde récession. Aujourd'hui, les employés se contentent de taux de paiement allant de 60 à 70 % de leurs salaires, avec un minimum ne dépassant pas 2000 à 3500 shekels par mois, un montant insuffisant pour couvrir les besoins de base dans un contexte de hausse des prix et de pressions économiques croissantes.

Compensation : La veine de vie coupée

La racine du problème réside dans la poursuite par Israël de la confiscation des fonds de compensation, qui représentent plus des deux tiers des revenus du Trésor palestinien. Cette mesure, qui a privé l'Autorité de sa source de financement vitale, a créé un énorme gap de financement s'élevant à 9,1 milliards de shekels (2,7 milliards de dollars), rendant le gouvernement incapable de remplir ses engagements fondamentaux. Au cours des trois derniers mois, Israël a refusé de transférer le moindre montant, fermant complètement la porte à toute solution rapide.

À cela s'ajoute la structure budgétaire écrasante, dans laquelle les salaires et les transferts sociaux représentent plus de la moitié des dépenses publiques. Sur un budget total de 2024 de 19,4 milliards de shekels, les salaires et traitements à eux seuls ont consommé 8,469 milliards de shekels, soit 43,63 % du budget. Cette structure écrasante laisse très peu de place pour toute manœuvre financière ou traitement des crises d'urgence, et rend le gouvernement prisonnier de toute fluctuation des revenus.

La situation devient encore plus sombre lorsque nous regardons le budget de 2025, approuvé par le président palestinien, qui présente un déficit financier approchant 7 milliards de shekels (1,9 milliard de dollars), un déficit énorme qui ne peut pas être couvert par les revenus disponibles. Le gouvernement dépend de plus en plus des emprunts internes pour couvrir les dépenses opérationnelles, une option qui aggrave le problème plutôt que de le résoudre, car elle ne conduit pas à une croissance économique réelle qui allègerait les pressions à l'avenir.

Obligations gouvernementales : Une solution sur papier ?

Au milieu de cette crise, la discussion sur l'émission d'obligations gouvernementales a émergé comme l'une des solutions proposées. En effet, le président palestinien a récemment approuvé une nouvelle loi sur la dette publique (n° 20 de l'année 2025), qui pave la voie à l'utilisation de cet outil financier. L'idée est que les employés reçoivent des obligations équivalentes à leurs créances, que le gouvernement remboursera plus tard avec des intérêts.

Cependant, cette solution, qui semble attrayante sur papier, se heurte à une réalité amère. Les obligations ne sont pas une solution immédiate à la crise de liquidité, car les employés ne pourront pas les convertir directement en espèces. Cela nécessite un mécanisme complexe permettant aux banques d'acheter ces obligations ou de les escompter, ce qui requiert de solides garanties gouvernementales et la disponibilité de liquidités suffisantes dans les banques, deux conditions absentes dans les circonstances actuelles.

Qui paiera le véritable prix ?

Les conséquences de cette crise ne touchent pas seulement les employés, mais s'étendent au cœur de l'économie palestinienne. Le secteur privé souffre d'un fort recul de la demande, les banques ressentent une baisse des flux de trésorerie, et le gouvernement lui-même se trouve piégé dans un cercle vicieux d'insuffisance financière. Lorsque l'employé perd sa capacité de consommation, cela se répercute directement sur les petites et moyennes entreprises, entraînant la fermeture des magasins, des licenciements et l'élargissement du chômage et de la pauvreté.

Glissement continu vers le gouffre

Les indicateurs économiques signalent un glissement dangereux et continu vers une crise plus profonde et plus sévère. Le ratio de la dette publique au produit intérieur brut a atteint 86,3 % à la fin de 2024, et les prévisions anticipent une hausse à 94,6 % en 2025, puis à 96,1 % en 2026. Ces chiffres reflètent un glissement constant vers une crise de la dette incontrôlable, surtout en l'absence de toute réforme structurelle réelle capable de maîtriser les dépenses et d'améliorer la collecte des revenus.

Le véritable danger réside dans le fait que le gouvernement pourrait se retrouver pris au piège d'un cycle d'emprunt croissant sans solution radicale. L'utilisation d'obligations sans aborder les causes fondamentales de la crise pourrait ouvrir la voie à davantage d'emprunts, entraînant un cumul de dettes impossibles à rembourser à l'avenir, et donc une faillite financière complète de l'État.
Sortir de ce tunnel sombre nécessite une volonté politique claire, une vision économique audacieuse qui dépasse les solutions temporaires et les palliatifs, et qui reconstruit le modèle financier palestinien sur des bases plus solides et durables. Ce qui est requis aujourd'hui, ce n'est pas seulement le paiement des salaires, mais le rétablissement de la confiance dans tout le système financier et l'ouverture d'une véritable fenêtre d'espoir pour une économie confrontée à ses plus difficiles épreuves.

Cet article exprime l'opinion de son auteur et ne reflète pas nécessairement l'opinion de l'Agence de Presse Sada.