835 millions de dollars sans provision : les chèques retournés révèlent la crise de liquidité en Palestine
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835 millions de dollars sans provision : les chèques retournés révèlent la crise de liquidité en Palestine

La crise des chèques retournés est l'une des crises les plus graves que traverse aujourd'hui l'économie palestinienne, car elle ne reflète pas seulement une tension de liquidité, mais révèle également un cercle vicieux de perte de confiance entre le citoyen et les banques, entre le commerçant et ses clients. Ce qui complique encore la crise, c'est son lien direct avec le problème de surplus de shekels dans les banques locales et l'incapacité du système bancaire à le déposer dans les banques israéliennes.

Des chiffres alarmants et une crise qui s'aggrave
"Une augmentation de 65 % en sept mois place les petits commerçants et les employés au cœur de la tempête"
Les données de l'Autorité monétaire montrent que le nombre de chèques retournés depuis le début de 2025 jusqu'à la fin juillet a dépassé 387 000 chèques pour une valeur avoisinant 835 millions de dollars, soit près d'un chèque sur six qui est retourné sans paiement.

Ce qui est le plus alarmant, c'est que les chiffres sont en augmentation : de 46 000 chèques en janvier à plus de 76 000 en juillet, avec une hausse d'environ 65 % en sept mois. Ce bond rapide prouve que ce phénomène n'est plus des cas isolés mais une crise structurelle. Pire encore, la plupart de ces chèques concernent les transactions des petites et moyennes entreprises, c'est-à-dire la colonne vertébrale de l'économie palestinienne.

Chaque chèque retourné signifie une transaction annulée, des salaires retardés, ou une petite entreprise qui a perdu la confiance de ses clients.

Les petites et moyennes entreprises... le plus grand perdant

Si les grandes entreprises peuvent absorber certaines pertes, les PME, qui représentent plus de 90 % de la taille du secteur privé, sont les plus touchées : un petit commerçant se voit empêché de renouveler ses marchandises en raison du non-paiement de ses créances.

Les start-ups s'étouffent et ferment leurs portes ou licencient leurs employés.

La confiance entre les commerçants s'effondre avec l'augmentation du refus des chèques ou des demandes de garanties cash préalables.

Du chèque à la crise du shekel
Derrière la crise se cache le dilemme du surplus de shekels. Plus de 22 milliards de shekels se sont accumulés dans les banques palestiniennes, non déposables dans les banques israéliennes en raison des restrictions, alors que le marché fait face à un manque de dollars et de dinars.

Cette paradoxale situation a conduit le système bancaire à faire face à une double contrainte écrasante : un surplus de shekels qui ne peut être échangé, et un déficit en devises fortes qui ne peut être compensé. Ainsi, le chèque en shekel a perdu sa valeur en tant qu'instrument de paiement, et le commerçant craint de l'accepter car il pourrait ne pas se convertir en liquidité réelle ou en devise nécessaire pour le commerce extérieur. 

Le fonctionnaire public, de victime à accusé

Le paradoxe est que le fonctionnaire public, considéré comme un client fiable, est devenu partie intégrante de la crise. Avec des salaires versés en fractions (parfois 80 % et parfois moins de 50 %), de nombreux employés ont eu recours à des chèques différés pour couvrir leurs obligations : les frais scolaires, les soins médicaux, les factures de l'électricité, de l'eau et des communications, voire le coût des produits alimentaires.

Mais lorsque le salaire est retardé ou réduit, ces chèques sont retournés pour insuffisance de fonds, plaçant les fournisseurs et les prestataires de services en situation de pertes directes. Ainsi, le fonctionnaire passe de victime de la crise des salaires à accusé d'émission de chèques sans provision, ce qui aggrave la perte de confiance et paralyse l'activité commerciale et même menace d'interrompre des services essentiels pour des familles entières.

Un impact multiplié sur la confiance et la stabilité

La crise des chèques retournés ne se limite pas à perturber les flux financiers entre les individus et les entreprises, mais entraîne une érosion de la confiance sur le marché et une diminution des transactions commerciales, ainsi que contraint les opportunités de croissance des petites et moyennes entreprises en raison de la perte de financement et de liquidité, se transformant finalement en une vaste crise sociale poussant des milliers de familles à faire face à des tensions économiques et à des affaires en suspens devant les tribunaux, menaçant ainsi la stabilité économique et sociale.

Que faut-il faire ?
Le problème n'est pas technique mais structurel. Ce qui est nécessaire :
Des solutions pratiques pour le surplus de shekels à travers des entendements internationaux ou des instruments locaux.
Des lignes de financement pour soutenir la liquidité des petites et moyennes entreprises.
Le développement des paiements électroniques pour réduire la dépendance aux chèques.
Des législations dissuasives pour protéger les victimes de chèques sans provision.

Conclusion
Les chèques retournés ne sont plus de simples morceaux de papier sans valeur, mais sont devenus un miroir révélant la profondeur de la crise monétaire et la perte de confiance dans le marché. C'est une hémorragie continue qui frappe les petits commerçants, mine la stabilité de milliers de familles et menace d'interrompre des services essentiels, tels que l'eau, l'électricité et les communications, pour une large part de la société.

Au lieu de faire du chèque un symbole d'engagement et de confiance, il est devenu un bout de papier à long terme incertain, transférant la crise d'un commerçant à un autre, d'une famille à l'autre, sans horizon clair de solution.

Cet article exprime l'opinion de son auteur et ne reflète pas nécessairement l'opinion de l'Agence de Presse Sada.