Des transferts aux investissements : l'argent palestinien à l'étranger recherche une patrie
Dans presque chaque foyer palestinien, il existe une histoire liée à un transfert d'argent en provenance de l'étranger. Un fils, un frère ou un proche travaillant dans le Golfe, en Europe ou dans les Amériques envoie, à la fin de chaque mois, un montant qui allège le fardeau de la vie quotidienne, permet de rembourser une dette ou finance des frais universitaires. Ces transferts, estimés entre 3,5 et 4 milliards de dollars par an, constituent l'une des principales artères de l'économie palestinienne, dépassant parfois le volume de l'aide internationale. Pourtant, malgré leur ampleur, ils sont restés confinés à la sphère de la consommation individuelle et n'ont pas encore été transformés en force de production et d'investissement capable de changer l'équation économique.
Ce qui renforce l'importance de ce sujet, c'est le fait que le nombre de Palestiniens vivant à l'étranger est aujourd'hui estimé à environ 7,4 millions de personnes sur un total de 14,8 millions de Palestiniens dans le monde, selon les données de l'Office central des statistiques palestinien. Cela signifie que plus de la moitié du peuple vit dans la diaspora, ce qui fait des expatriés un atout stratégique qui pourrait passer d'une source de transferts à une force d'investissement et de développement national si nous savions correctement orienter leur boussole économique.
Au cours des dernières années, les transferts d'argent de l'étranger ont constitué l'un des piliers de la résistance financière palestinienne, représentant environ 15 % du produit intérieur brut, un pourcentage qui dépasse, dans certaines années, le volume de l'aide internationale destinée à la Palestine. Bien que ces transferts aient contribué à augmenter la consommation privée d'environ 5 % par an, ils ne se sont pas traduits par une croissance des exportations ou un investissement productif, rendant leur impact économique plus proche d'un soutien de subsistance temporaire que d'un développement durable. L'absence de canaux institutionnels, la faiblesse de la confiance dans l'environnement d'investissement et l'absence de véritables incitations ont fait que l'expatrié se contente de l'aide familiale directe au lieu de s'engager dans un investissement à long terme, et ainsi l'argent palestinien à l'étranger reste éloigné de sa terre d'origine, malgré le besoin pressant qu'il y a à l'intérieur.
L'économie palestinienne a besoin d'un saut dans la pensée qui la sorte d'un modèle consumériste vers un modèle d'investissement participatif. Au lieu que les transferts demeurent un flux de liquidités dispersé, ils pourraient se transformer en capital collectif organisé à travers des outils pratiques, comme des fonds d'investissement communautaires pour les expatriés gérés par des institutions financières de confiance, et des titres d'investissement qui leur sont dédiés avec un rendement périodique lié à des projets réels dans leur pays d'origine, ainsi que des plateformes numériques nationales permettant l'investissement et le suivi à distance, renforçant ainsi la transparence et la confiance entre le capital à l'étranger et les projets à l'intérieur. Grâce à ces mécanismes, il est possible de transformer les transferts d'un soutien familial en un investissement national productif qui crée des emplois et atténue la vulnérabilité de l'économie.
Transformer la relation avec les expatriés d'une relation "d'envoi et de réception" à un partenariat pour le développement nécessite un cadre national sérieux. Le gouvernement peut lancer un programme national intitulé "Investisseurs de la diaspora", qui comprend des incitations fiscales et des garanties contre les risques, impliquant les banques et les fonds d'investissement locaux dans l'exécution. Le secteur privé et les universités peuvent également accueillir des initiatives dirigées par des expatriés qui allient argent, connaissance et expérience, car l'expatrié palestinien ne possède pas seulement de l'argent, mais il apporte également avec lui un réseau de relations et une expertise mondiale qui peuvent redessiner la carte de l'économie nationale s'ils sont bien utilisés.
Les transferts ne sont pas simplement des chiffres dans la balance des paiements, mais peuvent devenir un levier pour la souveraineté financière s'ils sont intégrés dans une vision économique nationale globale. Chaque dollar palestinien investi à l'intérieur réduit la dépendance à l'égard de l'aide et augmente la capacité de l'économie à résister aux pressions politiques et financières. Au lieu que les transferts restent un soutien temporaire pour l'individu, ils pourraient devenir un investissement permanent pour la patrie lorsque l'on passe d'une habitude financière à un système de développement basé sur la confiance et le rendement partagé.
Il est temps de voir l'expatrié palestinien comme un partenaire dans la construction de l'avenir, et non comme un simple soutien pour le présent. Les transferts ont été et restent un artère de vie, mais ils peuvent devenir un moteur de renaissance économique si nous sortons du cadre traditionnel de la réflexion et du financement. Lorsque la volonté et la vision se réunissent, l'argent à l'étranger devient une énergie pour la patrie à l'intérieur, et l'expatrié devient véritablement un partenaire dans le développement, non un simple expéditeur de dollars.
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