Un écrivain israélien avertit : les étapes de la colonisation menacent de trancher le sort de la Cisjordanie dans le silence

SadaNews - Michael Milshtein, chercheur et ancien officier du renseignement israélien, qui dirige le Forum des études palestiniennes au Centre Moshe Dayan de l'Université de Tel Aviv, a évoqué ce qu'il considère comme un "tsunami silencieux" mené par le gouvernement israélien en Cisjordanie. Il a souligné que ce changement se manifeste par des projets de colonisation comme le plan "E1" près de Jérusalem occupée, ainsi que par l'expansion coloniale générale et les mesures poussées par le parti Smotrich au sein de la coalition au pouvoir.

Dans son article publié dans le journal "Yedioth Ahronoth", Milshtein a averti que ces politiques entraînent des changements fondamentaux dans les réalités politique et démographique de la Cisjordanie progressivement et à l'écart des projecteurs, en raison d'un manque de sensibilisation du public israélien concernant leurs implications à long terme.

L'écrivain a averti qu'Israël fera face au pic de ce "tsunami" opposé en septembre prochain lors de la réunion des Nations Unies, qui sera marquée par une expansion de la reconnaissance de l'État palestinien, ce qui entraînera des conséquences stratégiques et politiques majeures pour Israël sur les plans intérieur et international.

Milshtein estime que ce "tsunami silencieux" exécuté par le gouvernement d'occupation ne figure généralement pas dans les nouvelles quotidiennes, mais menace de redéfinir le paysage politique et social en Cisjordanie, reflétant un tournant vers la politique d'un État sous un contrôle israélien élargi, avec des changements démographiques et juridiques fondamentaux, sans consulter le public israélien ni prendre en compte l'opinion mondiale.

L'ancien officier israélien fait référence à la déclaration du ministre Bezalel Smotrich la semaine dernière sur l'approbation de projets de construction dans la région d'"E1" près de Jérusalem, en affirmant que cette étape représente "un clou de plus dans le cercueil de l'idée d'un État palestinien".

L'annonce de Smotrich - selon l'écrivain - a suscité des réactions relativement limitées en Israël, qui était préoccupé par l'affrontement militaire à Gaza et par de nombreuses divisions internes. Cependant, la scène internationale a réagi par une forte condamnation, y compris de plusieurs pays amis d'Israël, ce qui révèle la fragilité de l'équilibre entre la politique intérieure israélienne et les pressions internationales croissantes.

Milshtein souligne qu'un seul parti au sein de la coalition, le parti du ministre des Finances Bezalel Smotrich, impose son agenda à l'ensemble du gouvernement sans que la position du "Likoud" ne soit claire ou se distingue de la vision du parti dur.

Dans ce contexte, l'écrivain souligne que le ministre des Finances a estimé depuis le début de la guerre qu'il y avait une occasion historique de redéfinir l'"ADN" de la Cisjordanie à travers l'expansion coloniale, atteignant le point de "non-retour" qui empêcherait toute séparation future, même si le gouvernement actuel tombait.

Il explique que ce qui se passe en Cisjordanie constitue également un modèle de ce qui pourrait se produire dans la bande de Gaza, où les promoteurs d'un changement dramatique cherchent à imposer une nouvelle réalité, sans consulter le public, sous le couvert d'une "stratégie réaliste" et de "leçons tirées du 7 octobre", profitant de conditions politiques anormales permettant d'imposer d'importants changements sur le terrain.

Milshtein attire également l'attention sur le fait que l'orientation vers une "unité d'État" entre le fleuve et la mer, comme indiqué dans le plan de résolution publié par Smotrich en 2017, "menacera la vision sioniste traditionnelle, créera une réalité de conflit continu et entraînera une isolation internationale à cause de ce qui ressemble à un apartheid".

Il souligne que ce changement se produit en silence, avec un mépris évident des avertissements stratégiques précédents concernant la possibilité d'une troisième Intifada ou de l'effondrement de l'autorité palestinienne.

Ignorer la pression internationale

L'auteur de l'article souligne que les décideurs israéliens ont tendance à ignorer la pression internationale, y compris les restrictions sur les voyages des ministres et des membres de la Knesset, considérant que les critiques proviennent d'un antisémitisme ou d'un soutien à l'extrémisme et au terrorisme, mais il insiste sur le fait que cette approche fait abstraction du fait que le différend fondamental avec la plupart des pays du monde concerne les politiques israéliennes envers les Palestiniens, et non un simple malentendu ou préjugé.

Selon l'ancien officier israélien, les actions et décisions symboliques prises au profit des Palestiniens ne constituent pas l'événement central, mais le changement réel réside dans les restrictions économiques, dans les relations de recherche scientifique et d'éducation, dont les premiers signes se manifestent maintenant et affecteront la vie de tous les Israéliens, y compris les opportunités d'éducation et de coopération internationale en Cisjordanie.

Milshtein note également un fossé dans l'opinion publique israélienne sur la question palestinienne, les citoyens ne recevant pas d'explication claire sur la position du gouvernement, qui oscille entre des politiques strictes parfois apparentes dans des symboles tels que "la Grande Israël" et des positions plus douces qui se sont manifestées lors de visites internationales, comme les récentes déclarations de Netanyahu sur une gestion palestinienne autonome.

L'écrivain estime que cette contradiction crée une situation d'ambiguïté au sein du public et est exploitée pour unifier les Israéliens autour du leadership, malgré des divergences profondes sur les politiques coloniales et expansionnistes.

Parier sur le soutien américain

Concernant le pari sur le soutien américain, l'auteur de l'article considère qu'il repose sur deux hypothèses fondamentales : la première est que Washington restera toujours aux côtés d'Israël et le soutiendra même lorsqu'il prendra des mesures d'annexion ou d'expansion en Cisjordanie et à Gaza. Il estime que "cette hypothèse réduit le champ de manœuvre politique d'Israël et nuit à ses relations avec des pays clés en Occident, comme on l'a vu avec la France et l'Australie, et ne prend pas en compte les changements potentiels dans les politiques américaines après l'administration Trump".

La deuxième hypothèse est qu'il n'est pas nécessaire de tenir compte de l'opinion publique mondiale, ce qui reflète une croyance implicite selon laquelle les critiques internationales peuvent être tolérées en échange de la réalisation de la vision de "l'ensemble de la Terre d'Israël". Cette approche utilise des symboles bibliques et idéologiques qui pourraient susciter des doutes dans le monde sur la nature de l'État et les changements effectués sur le terrain.

Milshtein souligne que les promoteurs de changement attaquent les artisans des accords d'Oslo et de déconnexion antérieurs, considérant qu'ils ont enfreint la volonté du peuple. En réalité, les promoteurs d'aujourd'hui imposent leur vision sans aucun référendum public ou élections, reflétant un dépassement des valeurs démocratiques fondamentales.

L'article conclut que les conséquences de ce "tsunami silencieux" commencent déjà à se concrétiser, mais que le pic demeure devant Israël, notamment le mois prochain avec l'intensification des pressions internationales. Il souligne également que les transformations en Cisjordanie représentent un avertissement de grande gravité concernant l'avenir d'un État unique, qui pourrait se réaliser dans le silence et mener à une véritable crise stratégique.