L'employé entre l'illusion de la reprise et la réalité de la stagnation : l'exemple de la crise des salaires
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L'employé entre l'illusion de la reprise et la réalité de la stagnation : l'exemple de la crise des salaires

À la fin de l'année 2024, l'économie palestinienne a enregistré une contraction historique de près de -27 %, laissant des effets lourds qui ont marqué l'année suivante. Malgré les estimations de l'Autorité monétaire palestinienne d'une croissance économique oscillant entre 1,6 % et 1,8 % en 2025, cette amélioration ne se reflète pas réellement dans la vie du citoyen, ni dans les marchés qui continuent de vivre une récession sévère. L'employé palestinien, qui reçoit un salaire incomplet et en retard, se trouve au cœur de cette paradoxie : des chiffres sur le papier confrontés à une crise étouffante sur le terrain.

Sous-salaires et crise aggravante

Le nombre d'employés de l'Autorité palestinienne s'élève à environ 153 000, avec une facture de salaires mensuels approchant le milliard de shekels (300 millions de dollars). Cependant, depuis des années, les salaires ne sont pas entièrement versés, le gouvernement se contentant souvent de ne verser que 70 %. En avril 2025, seuls 35 % du salaire ont été versés, tandis que seulement 50 % du salaire de juin (retardé jusqu'à septembre) ont été versés, avec un minimum n'excédant pas 2000 shekels, reflétant l'ampleur des défis financiers et l'accumulation des créances.

Engagements accumulés et dettes en expansion

Les salaires tronqués ne répondent pas aux besoins minimaux des employés, les obligeant à s'endetter ou à reporter le paiement des engagements tels que les frais scolaires et universitaires, les prêts bancaires et les factures de vie essentielles. Cette réalité a engendré une situation de pression financière chronique, entraînant de nombreuses personnes dans un cycle d'endettement qui se développe mois après mois. Les effets de la crise ne se sont pas limités aux aspects financiers, mais ont également touché les conditions sociales et psychologiques ; de nombreux employés ont reporté des décisions de vie importantes telles que le mariage ou l'achat d'une maison, tandis que penser à l'émigration est devenu une option sérieuse pour un grand nombre de jeunes en quête de stabilité.

Stagnation du marché et absence de reprise

La baisse des revenus par habitant s'est rapidement reflétée sur les marchés locaux, les dépenses des ménages se limitant aux essentiels. Cette contraction de la demande a causé une large stagnation commerciale, poussant de nombreux commerçants et propriétaires de petites entreprises à fermer ou à réduire leur activité, affaiblissant la capacité du secteur privé à contribuer à la création de nouveaux emplois.

Malgré des estimations optimistes d'une croissance économique limitée, la réalité indique une véritable stagnation. Ce qui est enregistré sur papier en tant que croissance ne reflète aucune reprise réelle, mais n'est qu'une "croissance technique" qui dissimule une inertie dans la consommation, une continuité dans l'arrêt des investissements et une lenteur dans le cycle de production.

Dysfonctionnement financier et dépendance extérieure

Les revenus propres de l'Autorité palestinienne, qui se chiffrent entre 350 et 400 millions de shekels par mois, ne suffisent pas à couvrir les salaires et les dépenses fondamentales. Ce déficit structurel explique la grande dépendance aux fonds de compensation retenus par Israël et à l'aide extérieure en déclin, rendant tout retard dans les flux financiers une cause directe d'une crise mensuelle.

À la fin de 2023, le gouvernement a obtenu un prêt global de 1,4 milliard de shekels (388 millions de dollars) pour couvrir une partie des salaires et des engagements urgents. Bien que le prêt ait temporairement permis de dégager une marge de manœuvre, il s'est ensuite transformé en un lourd fardeau, avec le début de l'échéance des versements face à des revenus faibles.

Solutions absentes... et vision attendue

Ce que vit aujourd'hui l'employé palestinien n'est pas une crise passagère, mais le résultat d'accumulations nécessitant une réforme radicale. Les solutions de fortune ne suffisent pas, et il faut adopter une vision globale fondée sur :

●     La restructuration des salaires en les reliant aux recettes effectives.

●     La réduction du sous-emploi au sein de l'appareil gouvernemental.

●     L'élargissement de l'assiette fiscale en luttant contre l'évasion et en intégrant l'économie informelle.

●     La création d'un fonds national pour les salaires garantissant un minimum décent en période de crise.

●     Le soutien à l'agriculture et à l'industrie, par le remplacement des importations et en stimulant la production locale.

De telles mesures ne sont pas de simples propositions théoriques, mais constituent une véritable porte d'entrée pour bâtir une économie plus résiliente, renforçant l'autonomie financière et rendant à l'employé sa dignité et son rôle dans le développement.

Conclusion

L'employé palestinien n'est plus seulement une victime d'une crise financière, mais vit au cœur d'une crise économique et sociale globale. La continuité de la situation actuelle sans réformes réelles menace non seulement son existence, mais met également en péril la stabilité de l'ensemble de la société palestinienne.

Cet article exprime l'opinion de son auteur et ne reflète pas nécessairement l'opinion de l'Agence de Presse Sada.