Les banques palestiniennes au cœur de la tempête : l'artère économique s'étouffe
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Les banques palestiniennes au cœur de la tempête : l'artère économique s'étouffe

SadaNews - Alors que l'économie palestinienne se trouve au bord de l'effondrement, les banques palestiniennes ne sont pas épargnées par les répercussions de la crise, mais se retrouvent au cœur de la tempête, faisant face à des pressions croissantes entre le marteau des crises financières et l'enclume des défis politiques, se transformant d'un acteur du développement en une entité luttant pour sa survie.

Les banques sont considérées comme un pilier fondamental pour la stabilité et la croissance de toute économie, mais la réalité complexe de la palestinienne – en raison de l'occupation, de la division et des crises successives – a placé ce secteur dans une position fragile malgré les signes apparents de stabilité. Un rapport de la Banque mondiale pour 2024 a mis en lumière les contours de la crise financière qui s'intensifie, à travers son analyse du niveau des dépenses publiques et de la dépendance de l'Autorité sur le système bancaire local, et le rapport actualisé de 2025 a confirmé la gravité de ces tendances, avertissant des conséquences directes menaçant la stabilité bancaire et financière dans son ensemble.

Le système bancaire palestinien se compose de 15 banques (7 locales et 8 étrangères), mais malgré ce nombre, il est observé que plus de la moitié des facilités bancaires dans certaines années va aux employés du secteur public, ce qui place les banques face à des risques doubles chaque fois que la relation financière entre le gouvernement et l'occupation concernant les fonds de compensation se détériore. Par ailleurs, le financement destiné aux projets productifs ne dépasse pas 15 à 20 % du total des facilités, tandis que les outils de financement pour le développement sont quasiment inexistants à Jérusalem en raison des complexités juridiques et politiques imposées sur la ville.

En l'absence d'une vision de développement intégrée, les banques se transforment en entités de financement de consommation, dominées par les prêts personnels et le financement de voitures ou de logements, alors même que le marché palestinien a besoin d'investissements productifs et de projets opérationnels.

Cette tendance à lier les facilités à des sources de revenus fixes (comme les salaires des employés) contribue d'un côté à réduire les risques à court terme, mais affaiblit d'un autre côté la capacité des banques à contribuer à la relance de l'économie, et les rend plus exposées aux chocs en cas de fluctuations des flux financiers du gouvernement.

D'autre part, les défis auxquels fait face le système bancaire ne se limitent pas seulement à la relation des banques avec le gouvernement, mais s'étendent à l'environnement politique et sécuritaire qui entrave les transferts financiers, et impose des restrictions israéliennes sur le mouvement des fonds, particulièrement des shekels, ce qui a entraîné une véritable crise de liquidité au sein des banques, les mettant sous la menace de sanctions ou d'effondrements progressifs si ces restrictions persistent.

L'escalade de la crise des shekels entassés dans le système bancaire, en raison de la réticence des banques israéliennes à recevoir l'excédent monétaire, approfondit la crise de liquidité, affaiblissant la capacité des banques à prêter ou même à honorer leurs engagements quotidiens envers leurs clients. Dans le même temps, l'Autorité monétaire fait face à une équation complexe entre le besoin d'intervenir pour protéger le système bancaire et les restrictions imposées à sa souveraineté monétaire.

Des estimations indiquent que le pourcentage d'emprunteurs parmi les employés du secteur public dépasse 50 % du total des emprunteurs, un pourcentage qui reflète l'interconnexion du système bancaire avec la stabilité des salaires gouvernementaux. En outre, la proportion de projets économiques financés par les banques à Jérusalem et dans ses environs reste extrêmement limitée, créant une lacune de financement dans l'une des zones les plus sensibles en matière de besoin de soutien économique et politique.

Malgré ces défis, il est indéniable les efforts déployés par les banques et l'Autorité monétaire pour maintenir une stabilité relative dans le système bancaire, à travers des mesures préventives, des allocations financières et des restrictions sur les prêts non sûrs. Mais cette stabilité demeure fragile, dépendant de la continuité des flux financiers externes et de la capacité du gouvernement à tenir bon, ce qui est devenu risqué.

La réalité des banques palestiniennes aujourd'hui est un reflet direct de l'environnement politique et économique fragile, et représente un indicateur dangereux de la profondeur de la crise. Parce que les banques représentent l'artère de l'économie, tout étranglement en leur sein se répercutera sur tous les aspects de la vie économique, du marché du travail à l'investissement, de la capacité des individus à dépenser à celle des entreprises à croître.

Ainsi, la protection du secteur bancaire nécessite une action intégrée qui inclut :

Élargir la base productive de l'économie palestinienne, pour créer des sources de revenus alternatives et indépendantes.
Renforcer les outils de financement destinés aux petites et moyennes entreprises.

Exercer une pression politique et internationale pour lever les restrictions israéliennes sur les transferts de fonds.

Restructurer la relation entre les banques et le gouvernement pour réduire la dépendance mutuelle excessive.

Construire des outils de souveraineté pour renforcer la capacité de l'Autorité monétaire à intervenir efficacement en temps de crise.

Créer un fonds d'urgence bancaire qui améliore la capacité à faire face aux crises à court terme.

En conclusion, la crise des banques n'est plus une simple question technique à résoudre par des mesures financières, mais est devenue une question de souveraineté par excellence, nécessitant une vision stratégique nationale qui redéfinit le rôle des banques comme levier de l'économie et non comme simple outil pour faire tourner les crises. La protection du secteur bancaire ne peut être dissociée du projet d'indépendance économique palestinienne, qui commence par se libérer de la dépendance financière et passe par la récupération de la décision souveraine et la construction d'une économie productive solide.

Cet article exprime l'opinion de son auteur et ne reflète pas nécessairement l'opinion de l'Agence de Presse Sada.