Les pressions internationales poussent Israël vers une isolation sans précédent qui pourrait menacer ses intérêts

SadaNews - Dans un article d'analyse publié par l'agence de presse américaine Bloomberg, l'écrivain Mark Champion dresse un tableau sombre de l'avenir d'Israël si le gouvernement de Benjamin Netanyahou continue sa politique de "plus de guerre", ignorant les voix internes et externes appelant à stopper l'hémorragie et à présenter une vision politique claire pour l'après à Gaza.

L'article se demande : comment Israël en est-elle arrivée à cette étape ? Et comment peut-elle en sortir ? Ajoutant que ces deux questions semblent inévitables après que Netanyahou - recherché par la Cour pénale internationale - a répondu à des mois de critiques et de colère concernant sa gestion de la guerre à Gaza, par plus de guerre.

Le chroniqueur révèle comment Israël est passée d'une "moment de sympathie internationale sans précédent" après les attaques du 7 octobre 2023 - qui ont fait 1 200 morts et 250 otages - à une situation d'isolement politique et moral aigu, après la destruction à grande échelle de Gaza et la mort de dizaines de milliers de civils, utilisant la nourriture et les médicaments comme armes, et l'ouverture d'une enquête internationale sur des accusations de génocide.

Champion note que les alliés traditionnels d'Israël, qui refusaient de reconnaître l'État de Palestine, sont en train de se tourner vers son soutien de peur que l'objectif ultime de Netanyahou soit la destruction de la bande de Gaza et la préparation des conditions pour expulser ses habitants palestiniens et les remplacer par des colons juifs.

Il souligne que la récente décision de Netanyahou de contrôler la ville de Gaza est venue malgré les conseils du Chef d'état-major de l'armée, Eyal Zameer, de ne pas procéder à cette opération, et que son plan manque d'une stratégie de sortie claire et contredit les conditions des pays arabes pour participer à la phase post-Hamas.

Un environnement régional hostile

Les familles des prisonniers restants détenus par le Hamas craignent que ce plan ne soit un arrêt de mort pour leurs proches, tandis que les alliés d'Israël l'ont condamné pour ce que cela entraînera "inévitablement" de coût humain. Tout cela, selon l'écrivain, a suscité des dissensions au sein même du gouvernement israélien et a poussé l'Allemagne à suspendre les exportations d'armes qui pourraient être utilisées à Gaza.

Champion poursuit en disant que pour cette raison, 550 généraux et anciens responsables des services de renseignement israéliens ont adressé une lettre ouverte au président américain Donald Trump, lui demandant d'intervenir pour forcer le gouvernement de Netanyahou à mettre fin à une guerre qui a, selon eux, perdu toute justification militaire.

Il cite l'ancien Premier ministre israélien Ehud Olmert mettant en garde contre le fait que la dépendance excessive d'Israël à la force affaiblit ses relations avec des alliés clés et menace de laisser 10 millions d'Israéliens seuls face à un environnement régional hostile.

L'écrivain estime que la dépendance d'Israël uniquement à la force pour traiter avec les autres parties dans la région - des Palestiniens à l'Iran, au Liban, à la Syrie - affaiblit rapidement le soutien dont elle bénéficie de la part d'alliés clés au Moyen-Orient, en Europe et même aux États-Unis.

Bien qu'il reconnaisse les victoires militaires d'Israël contre le Hezbollah libanais et l'Iran au cours de l'année dernière, Champion met en garde contre un déséquilibre possible des forces, citant l'expérience des Arméniens au Haut-Karabakh. Il mentionne également des experts, comme Lawrence Freedman, affirmant que l'occupation permanente de Gaza signifie une guerre permanente et une isolation croissante d'Israël.

Le fils est le secret de son père

L'article de Bloomberg établit un lien entre les positions actuelles de Netanyahou et l'héritage de son père Benzion Netanyahou, un penseur sioniste ultraconservateur qui a refusé tout compromis avec les Arabes et a appelé à l'annexion de toutes "les terres bibliques d'Israël".

Avant sa mort en 2012, Benzion a clarifié dans ses écrits et ses interviews qu'il voyait les Arabes (et pas seulement les Palestiniens, dont il a nié l'existence en tant que nation distincte) comme des ennemis par nature et incapables de parvenir à une solution, et que "le seul moyen est la force" pour les traiter.

Lorsqu'on lui a demandé pourquoi son fils semblait parfois moins strict que lui, il a répondu que c'était une position dictée par la nécessité politique, mais que l'essence de leurs positions était la même.

Champion estime que l'approche du Premier ministre resté le plus longtemps au pouvoir et sa poursuite d'affaiblir les institutions indépendantes qui limitent son pouvoir s'inscrivent dans une vague de populisme en Occident.

Cependant, il croit que la géographie d'Israël place la question dans un contexte différent, car ses motivations internes sont devenues plus semblables à celles d'autres pays de la région.

Le gouvernement d'Israël - et l'écrivain parle ici - est le miroir de la profonde transformation démographique et politique que connaît la société israélienne, représentée par l'augmentation de l'influence des Juifs ultra-orthodoxes de la secte des Haredim et des colons, des courants religieux et nationalistes extrêmes, et d'autres.

Il dit que tous ceux-ci partagent avec la famille Netanyahou leurs idées absolues sur les Arabes et le droit divin d'Israël à l'expansion régionale, affirmant que cela compromet l'image d'Israël en tant qu'État démocratique libéral.

Un nettoyage ethnique voilé

Champion révèle que, bien que les sondages montrent que la majorité des Israéliens souhaitent un cessez-le-feu, ils expriment une position conditionnelle, la plupart d'entre eux liant cela à la libération des prisonniers et étant prêts à reprendre la guerre par la suite. Une grande proportion soutient également l'évacuation de Gaza de ses habitants palestiniens, une position qui était marginale avant les événements du 7 octobre 2023.

La "migration volontaire", comme elle est présentée par le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir et le ministre des Finances Bezalel Smotrich, ne serait rien d'autre - selon leurs propres termes - qu'un "nettoyage ethnique déguisé".

Champion explique que le terme migration volontaire a été formulé lors des guerres yougoslaves dans les années 1990 pour décrire les plans des Serbes de vider des régions de non-Serbes. Il compare ce qui se passe à Gaza à ce qui s'est passé en Yougoslavie, en Ukraine, en Géorgie et en Arménie, affirmant que cette stratégie, même si elle a parfois réussi, ne fonctionnera pas dans un pays où trois religions sont en conflit.

Pour changer cette trajectoire, Champion estime qu'il est nécessaire d'une intervention directe des États-Unis, d'une pression sur le Premier ministre israélien pour accepter la solution à deux États et permettre à l'Autorité palestinienne de gérer Gaza, en échange de la normalisation des relations avec les pays du Golfe et de leur prise en charge de la reconstruction.

Il appelle également l'opposition israélienne à garantir la continuité du gouvernement en cas de retrait des extrémistes, jusqu'à ce que la guerre soit terminée et à convoquer des élections anticipées.

Il met en garde que le soutien ouvert de Washington à l'approche de Netanyahou ignorera le fait qu'Israël n'est pas une entité uniforme et que la poursuite de la guerre pourrait la plonger dans une isolation internationale incontrôlable.

Source : Bloomberg