Émission d'obligations : un fossé entre les aspirations du gouvernement et la vision du secteur bancaire
Économie locale

Émission d'obligations : un fossé entre les aspirations du gouvernement et la vision du secteur bancaire

Exclusive SadaNews : Un débat sans fin depuis l'annonce, le mois dernier, d'un décret-loi n° (20) de l'année 2025 modifiant la loi sur la dette publique n° (24) de l'année 2005. Entre partisans et opposants aux dispositions de cette loi, l'idée que le gouvernement émette des obligations pour gérer la dette publique reste un véritable sujet de désaccord entre les aspirations du gouvernement, qui y voit une opportunité de réorganiser sa dette accumulée à cause des crises financières, et la vision du secteur bancaire qui considère que "l'émission d'obligations" à ce stade est une affaire gouvernementale sans lien avec lui.

Des sources gouvernementales avaient précédemment annoncé que le ministère des Finances envisageait d'émettre des obligations destinées au secteur privé et aux employés du secteur public, après l'échec de tentatives antérieures avec les banques opérant sur le marché local pour les acquérir. Selon ces sources, l'une des propositions discutées serait que le ministère des Finances vende les obligations aux employés publics intéressés par cette démarche, en échange de leurs créances sur le gouvernement, qui correspondent à ce qui reste de leurs salaires mensuels depuis novembre 2021.

De plus, le ministère proposera des obligations au secteur privé, en particulier aux entreprises souhaitant investir dans des instruments de dette gouvernementale, ce qui serait la première de ce type sur le marché palestinien.

Bien que la délivrance d'obligations ne reste qu'une idée en cours d'étude, comme l'a déclaré l'expert économique Mouayad Afana à "SadaNews", il souligne qu'une entreprise jordanienne a été mandatée pour étudier le sujet sous différents angles, dans un contexte d'incertitude quant à la possibilité de sa mise en œuvre prochaine.

L'expert économique Dr. Saïd Sabri explique à "SadaNews" ce qu'est une obligation gouvernementale, en indiquant qu'il s'agit d'un instrument de dette par lequel le gouvernement emprunte des fonds aux particuliers et aux institutions en échange d'un intérêt fixe et d'une échéance claire.

Il ajoute : "Les gouvernements émettent des obligations pour financer un déficit budgétaire, mettre en œuvre des projets de développement ou diversifier des sources de financement en dehors d'emprunts extérieurs. Les obligations sont également utilisées pour gérer la liquidité sur le marché et renforcer la capacité à couvrir les engagements sans recourir de façon répétée à l'emprunt direct".

Quant à savoir si la situation palestinienne actuelle est propice à l'émission d'obligations gouvernementales, Saïd dit : "L'environnement palestinien fait face à des défis qui rendent l'émission d'obligations complexe ; les plus notables étant l'absence de souveraineté monétaire, la dépendance au shekel et l'augmentation des risques politiques et financiers".

Il ajoute : "Bien qu'il existe un système bancaire solide, le montant de la dette intérieure et le déficit chronique réduisent l'attrait des obligations pour les investisseurs. Par conséquent, les conditions actuelles ne sont pas favorables à une large émission, sauf si elle est destinée à des projets spécifiques et accompagnée de garanties extérieures réduisant les risques et assurant la confiance".

En ce qui concerne son explication du manque de volonté de l'Autorité monétaire à monétiser les obligations en cas d'émission, Saïd a souligné que le fait que l'Autorité monétaire ne monétise pas les obligations signifie qu'elle ne les considérerait pas comme des actifs liquides que les banques pourraient convertir en liquidités rapidement si nécessaire.

Il poursuit : "Cela place les banques devant des risques élevés sans (acheteur final) qui les soutienne, ce qui réduit leur désir de s'engager. Ainsi, la relation entre le gouvernement et l'investisseur endosse tous les risques sans intervention réglementaire pour les atténuer, ce qui limite pratiquement la possibilité de succès de l'émission d'obligations gouvernementales dans les conditions actuelles".

L'expert économique Mohamed Salama s'est étonné, lors d'une rencontre avec "SadaNews", de la manière dont le décret-loi relatif à la dette publique a été adopté sans l'Autorité monétaire, se demandant : "Pourquoi est-elle mise à l'écart ou blâmée ? Comment la politique financière peut-elle fonctionner sans coordination avec la politique monétaire ?".

Il a ajouté : "L'Autorité monétaire joue le rôle de la banque centrale, et son rôle ne se limite pas à la supervision, mais elle est censée émettre des obligations au nom du gouvernement, déterminer le rendement, gérer les enchères et réaliser l'étude de faisabilité".

En réponse à une question posée par "SadaNews" au vice-gouverneur de l'Autorité monétaire, Mohamed Mnasra, sur le rôle de l'Autorité monétaire en cas d'émission d'obligations par le gouvernement, il a confirmé que le rôle de l'Autorité monétaire s'est limité à faire quelques propositions pour le nouveau projet de loi sur la dette publique après son dépôt auprès du président Mahmoud Abbas. Il a indiqué que l'Autorité monétaire avait demandé des modifications sur le ratio de la dette publique afin qu'elle passe de 40% par rapport au produit intérieur brut à 80%, en plus de définir ce qu'est la dette publique pour inclure tous les engagements de l'autorité nationale, ainsi que la création d'un compte de remboursement de la dette.

Concernant la possibilité que l'Autorité monétaire soit partenaire dans la monétisation des obligations en cas d'émission par le gouvernement, il a déclaré : "L'émission d'obligations est une affaire qui concerne le gouvernement et nous ne ferons pas partie des opérations de monétisation à l'avenir".

Selon des données bancaires, le montant des facilités accordées en Palestine à la fin du premier semestre de cette année était d'environ 11,6 milliards de dollars, dont environ 3,3 milliards de dollars de facilités pour le secteur public, ce qui est considéré par les observateurs comme le maximum pouvant être accordé au gouvernement en raison de mesures préventives visant à protéger les fonds des déposants.

Des données récentes du ministère des Finances ont indiqué que les créances accumulées dues aux employés du secteur public s'élevaient à 6,6 milliards de shekels à la fin du mois de septembre dernier, tandis que la dette publique totale et les arriérés dépassaient le seuil de 47 milliards de shekels, au milieu d'une crise financière aiguë que subit l'Autorité nationale dans le contexte de la rétention par Israël de près de 13 milliards de shekels de fonds de compensation, représentant 68% du total des recettes publiques.