Les coûts financiers élevés et les fardeaux économiques importants résultant de la guerre à Gaza n'ont pas empêché le gouvernement israélien de prolonger et d'élargir le conflit à des fronts supplémentaires. Malgré ces guerres, l'économie israélienne est restée solide sans problèmes sérieux qui entravent ou empêchent les plans du gouvernement. Cependant, certains indicateurs économiques centraux ont montré un déclin, tels que : la baisse de la croissance économique, l'augmentation du déficit budgétaire, l'augmentation de la dette extérieure, la diminution des investissements étrangers et, dans une certaine mesure, l'absence d'augmentation des exportations israéliennes.
Il est vrai que le soutien américain à l'économie israélienne au cours des deux dernières années, estimé à 22 milliards de shekels depuis le début de la guerre à Gaza, est l'un des facteurs expliquants la résilience de l'économie israélienne, mais il est également nécessaire de prendre en compte la capacité de l'économie israélienne à gérer les circonstances de guerre et d'urgence. L'économie israélienne a réussi à maintenir la continuité du cycle économique, à faire fonctionner les marchés et la production, et à s'adapter au coût économique élevé malgré les conditions de guerre.
La capacité de l'économie israélienne à faire face aux changements au cours des dernières années n'est pas le fruit du hasard, mais plutôt le résultat d'une accumulation de bonnes performances économiques au cours des deux dernières décennies, ainsi que de l'expérience réussie face à la crise du coronavirus en 2020. Plus important encore, cela résulte des transformations dans la structure et la composition de l'économie israélienne au cours des deux dernières décennies, où elle est passée d'une économie traditionnelle à une économie moderne et avancée, reposant sur des industries et des services de haute technologie, et s'appuyant principalement sur les marchés mondiaux répartis sur tous les continents.
Malgré tout cela, la situation économique reste tributaire des situations politique et sécuritaire, comme le montre le rapport trimestriel de la Banque d'Israël publié au début du mois de juillet. Le rapport indique que la poursuite et l'extension de la guerre dans la bande de Gaza et ses coûts financiers et économiques pourraient entraîner un déclin de la situation économique, une augmentation des charges financières et un approfondissement des crises économiques.
Transformations économiques au cours des décennies
L'économie israélienne a enregistré des résultats positifs dans la plupart des indicateurs économiques au cours des deux dernières décennies, jusqu'au début de la guerre à Gaza, et a réussi à faire face à la crise de la pandémie de coronavirus en 2020, ce qui a entraîné peu de dommages économiques qui ont rapidement été surmontés en 2021, avec un retour à la croissance et à l'expansion. Le taux de croissance économique entre 2010 et 2019 était d'environ 4,2 %, tandis que le taux de chômage pendant la même période était de 3,8 %, un chiffre très bas indiquant une quasi-plein emploi. Le taux de participation au marché du travail était d'environ 64 % de la population active, un niveau très élevé.
Le trésor de l'État a bénéficié de cette croissance grâce à l'augmentation des revenus fiscaux, ce qui a contribué à réduire le déficit budgétaire du gouvernement et la dette extérieure entre 2010 et 2019. Une bonne situation économique a aidé le gouvernement israélien à gérer les conséquences économiques et financières de la crise du coronavirus, en particulier la nécessité de mobiliser d'importants budgets pour soutenir l'économie et compenser les secteurs économiques touchés.
Le recul de la crise du coronavirus et le dynamisme de l'activité économique ont conduit à une amélioration significative des indicateurs financiers en 2022. Le budget du gouvernement a enregistré un excédent de 0,6 % du produit intérieur brut en 2022, par rapport à un déficit de 4,4 % en 2021. La dette publique a diminué à 60,7 % du produit intérieur brut, un niveau légèrement supérieur à celui avant la crise du coronavirus. Le ratio des dépenses publiques par rapport au produit intérieur brut a diminué, tandis que les recettes publiques ont augmenté. L'augmentation rapide des recettes fiscales, associée à une croissance économique rapide, a reflété des facteurs exceptionnels tels que l'afflux de capitaux vers le secteur de la haute technologie et l'activité élevée sur le marché immobilier.
Début des crises
On ne peut dissocier la situation économique en Israël de la situation politique. Au début de l'année 2023, le ministre de la Justice israélien Yariv Levin a annoncé son plan global de "réforme judiciaire" visant à changer la face du pouvoir judiciaire en Israël. L'annonce de ce plan a conduit à une crise politique accompagnée de manifestations massives dans la société israélienne.
Le début des manifestations et l'escalade des tensions politiques ont eu des conséquences économiques. Par exemple, le secteur des affaires et les grandes entreprises israéliennes ont annoncé leur soutien au mouvement de protestation, culminant par l'annonce d'une journée de grève générale dans toutes les installations économiques. Les inquiétudes concernant la baisse des investissements étrangers, le départ de certaines entreprises de haute technologie d'Israël, les menaces de retrait de dépôts des banques israéliennes, la baisse de la valeur du shekel, la faiblesse des performances du marché boursier et les craintes d'une dégradation de la note de crédit de l'État d'Israël se sont également intensifiées.
Malgré tous ces avertissements et inquiétudes, le dommage économique résultant du plan de restriction judiciaire sur le terrain est resté limité et n'a pas évolué ni s'est étendu. Cependant, les événements du 7 octobre ont changé le cours de l'histoire en Israël, y compris celui de l'économie.
La veille de la guerre à Gaza, les indicateurs économiques étaient globalement bons. Les prévisions de croissance économique pour les années 2023-2024 étaient d'environ 3 %, avec des taux de chômage faibles proches de 3,5 %, et des prévisions d'inflation modérée d'environ 3,8 %. Dans le même temps, il y avait une baisse de la valeur du shekel par rapport au dollar en 2023, et le taux d'intérêt directeur a atteint un niveau record de 4,75 %. Le déficit budgétaire du gouvernement a également augmenté de 1,5 % du produit intérieur brut. Bien que ces chiffres aient été légèrement pires qu'en 2022, ils étaient généralement modérés et n'indiquaient pas de crise économique grave en Israël. Ainsi, l'économie israélienne est entrée en guerre à Gaza avec de bonnes conditions économiques de base, renforçant ses capacités à gérer les impacts économiques de la guerre.
Les effets économiques de la guerre à Gaza
Depuis le début des événements du 7 octobre et le début de la guerre à Gaza, puis l'ouverture du front libanais, il est clair que le coût économique et financier de cette guerre sera élevé et coûteux pour l'économie israélienne. L'attaque du mouvement Hamas contre les villes frontalières du sud a causé de lourds dégâts aux infrastructures et aux habitations, entraînant le déplacement d'un grand nombre de résidents de ces villes, et forçant le gouvernement à financer des logements alternatifs et à couvrir le coût de la vie. L'activité économique dans les régions du sud a été presque complètement paralysée pendant plus d'un mois. Ensuite, l'activité économique dans les villes du nord a également cessé en raison de l'ouverture du front par le Hezbollah, puis s'est arrêtée complètement en raison d'une large offensive israélienne au Liban en septembre 2024. C'était la première fois depuis 1973 que l'armée israélienne procédait à un large rappel des réservistes, près de 300 000 soldats, avec tous les coûts qu'implique cette opération.
Le gouvernement a dû mobiliser d'importants budgets pour financer les coûts directs et indirects de la guerre, y compris l'accroissement de la dette extérieure du gouvernement et l'augmentation du déficit budgétaire. Par ailleurs, la guerre d'extermination à Gaza et au Liban et ensuite en Iran a entraîné un déclin de la position économique internationale d'Israël; ce qui implique un affaiblissement progressif de la note de crédit israélienne et une augmentation des taux d'intérêt sur les prêts; la baisse des investissements étrangers dans l'économie israélienne ainsi que des exportations israéliennes; tout cela s'accompagnant d'une inflation monétaire et d'une hausse des taux d'intérêt.
Le coût économique de la guerre
Les estimations de la Banque d'Israël et du ministère des Finances concernant le coût financier depuis le début de la guerre à Gaza, y compris la guerre au Liban et un coût initial pour la guerre en Iran, pourraient atteindre 320 milliards de shekels. La guerre a entraîné une augmentation du budget du ministère de la Défense, qui s'élevait en 2023 (avant le déclenchement de la guerre) à environ 60 milliards de shekels. Le budget du ministère de la Défense pour l'année 2024 a atteint environ 99 milliards de shekels, et en 2025, le budget pour la défense pourrait atteindre environ 109,8 milliards de shekels.
Parmi les effets négatifs les plus marquants de la guerre à Gaza figure le déclin de la croissance économique en Israël. Selon les données du Bureau central des statistiques, la croissance économique en 2023 a été d'environ 2 %, et la croissance en 2024 n'atteindra que 1 %. Le déficit budgétaire en 2023 a été d'environ 4,2 %, et en 2024 proche de 7 %. Il est prévu qu'il atteigne 5 % en 2025. La dette extérieure par rapport au produit intérieur brut devrait augmenter pour atteindre environ 70 %, contre 60 % ces dernières années. Pour financer ces coûts, le ministère des Finances a emprunté à un niveau presque sans précédent. La dette du gouvernement est passée de 1,04 trillion de shekels à la fin de l'année 2022 à 1,32 trillion de shekels en 2024.
Prévisions optimistes, mais conditionnelles
Le département de recherche de la Banque d'Israël a publié au début du mois de juillet ses prévisions pour l'économie israélienne globale pour la seconde moitié de l'année 2025 et pour 2026. Selon le rapport, le produit intérieur brut devrait croître de 3,3 % en 2025, et de 4,6 % en 2026, ce qui indique un retour progressif de l'économie israélienne à la croissance économique et une sortie de la crise liée à la guerre à Gaza. On s'attend également à ce que le déficit du budget de l'État atteigne 4,9 % et 4,2 % du produit intérieur brut respectivement en 2025 et 2026. La dette publique devrait atteindre 70 % du produit intérieur brut en 2025, et 71 % en 2026.
Ces prévisions prennent en compte les estimations préliminaires des coûts de la guerre en Iran, ainsi que des dépenses supplémentaires qui n'avaient pas été budgétées pour 2025 pour la poursuite de la guerre dans la bande de Gaza. Le département de recherche estime que les coûts civils de la guerre en Iran, c'est-à-dire les dommages aux villes israéliennes et les compensations pour pertes dues à l'interruption du travail, devraient atteindre environ 10 milliards de shekels, dont la majeure partie sera financée par le fonds de la taxe foncière, et ne sera donc pas comptabilisée dans le déficit du gouvernement central.
Cependant, ces prévisions positives, en quelque sorte, sont conditionnelles selon le rapport de la Banque d'Israël à la situation sécuritaire et politique. La Banque d'Israël souligne que l'incertitude entourant ces prévisions est élevée, mais contrairement aux estimations antérieures, cette évaluation comprend des risques potentiels dans les deux sens – à la hausse et à la baisse. D'une part, selon les rédacteurs du rapport, les résultats de la guerre en Iran pourraient réduire les risques sécuritaires pour Israël, et il semble (au moment de la rédaction du rapport) qu'il existe une possibilité d'atteindre un règlement qui mettrait fin à la guerre à Gaza, et qui pourrait peut-être ouvrir la voie à un accord plus large de relations dans la région. La réalisation d'un règlement sur différents fronts pourrait atténuer le niveau de risques pour l'économie, alléger les contraintes d'approvisionnement, et pourrait également contribuer à une augmentation de la demande et des investissements au cours des années à venir.
D'autre part, l'incertitude concernant les effets à long terme de la guerre en Iran et la situation sécuritaire comporte des risques qui suggèrent que l'amélioration sécuritaire pourrait être temporaire, et que son impact positif sur l'économie sera limité. En ce qui concerne Gaza, si un cessez-le-feu ne conduit pas à un règlement permanent et que les combats se poursuivent ou s'intensifient, le risque de poursuite des contraintes d'approvisionnement affaiblira la reprise de l'activité économique, laissant la croissance faible et le déficit budgétaire élevé. Dans ce cas, le gouvernement continuera à augmenter le budget de la défense, à gérer les coûts de la guerre, et à accroître la dette extérieure et le déficit budgétaire.
Cela montre que la capacité de l'économie israélienne, bien qu'elle ait jusqu'à présent pu faire face à l'état de guerre, reste limitée et ne peut pas supporter une guerre sans fin, d'autant plus que les autres fronts ne sont pas encore entièrement fermés et demeurent flous. Même le secteur des technologies avancées, qui repose principalement sur les marchés mondiaux, ne peut pas protéger l'économie israélienne de manière illimitée.